Rencontres 2025

La vue retrouvée

Dès 1976, année de la sortie de Cría Cuervos, Ana Torrent a donné son visage à l’enfance de l’Espagne post-franquiste. Trois ans plus tôt, elle jouait déjà dans L’Esprit de la ruche de Víctor Erice.
Au début de ce film incontournable du cinéma espagnol, un cinéma itinérant attire les enfants d’un village du plateau castillan. Parmi ces enfants, la petite Ana. Son visage absorbé : entre le cinéma et ce visage, une aventure naît. La placidité et l’intensité de ces grands yeux intelligents révèlent que l’innocence n’est plus de mise dans ces années 70. Une enfant sérieuse en métaphore d’un pays : c’est entre autres un des drames du franquisme que d’avoir volé des enfances – celles des générations nées pendant cette période ; celles des bébés vendus-; celles des gosses de villes et de villages, obligés de se plier aux lois du monde adulte, souvent s’en détournant, parfois les contestant. Si, dans L’Esprit de la ruche comme dans Cría Cuervos, Ana est avec d’autres enfants, c’est pourtant bien elle le révélateur solitaire de ces adultes qui «-semblent avoir perdu la capacité de sentir la vie-» (L’Esprit de la ruche). Pleinement enfant dans le geste précis de nouer ses lacets mais ne sautant pas au-dessus du feu comme les autres. Une enfant qui n’a pas sommeil, là encore métaphore d’un pays qui ne veut pas dormir, mais se tient au contraire éveillée, à l’affût des agissements secrets, pervers, prête à tout voir même sans tout comprendre. Ana voit d’ailleurs ce que les autres ne voient pas, ne peuvent ou ne veulent pas voir : elle est le contrechamp du mensonge et de l’hypocrisie. Et du refoulement, la petite imitant, rejouant, rêvant, se souvenant, pour (se) libérer. Son effronterie intérieure, le risque de désobéir, sa capacité à vivre la joie d’un instant (l’importance du lien avec ses soeurs), sa manière de s’emparer du poison (champignon vénéneux chez Erice ou mort aux rats chez Saura), son empathie, son indépendance, tout cela semble avoir conduit Ana à être une des deux mères de Dos Madres (2023), comme si avoir à l’esprit l’enfant qu’elle fut lui permit d’être une mère vivante, saine, courageuse, honnête. Si son visage d’enfant s’est gravé de face dans l’histoire du cinéma, c’est de profil qu’on la retrouve adulte chez Iriarte. Les deux films récents de l’actrice née en 1966 – Dos Madres (Víctor Iriarte) et Fermer les yeux (Víctor Erice) – n’ont rien à envier aux coups de maître dans lesquels elle débuta sa carrière, d’autant qu’ensemble, les quatre films lui ont légué un pouvoir de clairvoyance (Ana est d’ailleurs celle par qui le squelette voit dans L’Esprit de la ruche). Paradoxalement, il faut, pour cela, savoir fermer les yeux. PA.

Un art de vivre espagnol

Deux monuments de la culture hispanique : la danse et la musique. Des films de patrimoine emblématiques aux films en sortie nationale vibrants, ce chapitre, composé de 4 films, nous invite à une chose : le mouvement !

Pas de RENCONTRES sans compétition courts-métrages. 3 programmes composés d’un total de 29 courts-métrages, à découvrir toute la journée du samedi. Un grand horizon composite de techniques, de sujets, de médiums, de nationalités… Bref, de quoi satisfaire tous les goûts.
Pour les retardataires (et les accros), le rendez-vous sera donné le dimanche matin pour la session de rattrapage avec tous les courts qui seront primés pendant le festival.

Haut comme 3 robots

Impossible pour nous de conclure la programmation sans proposer un film accessible pour toute la famille. Retrouvez très vite le film choisi par la commission de programmation (et validé par toute l’équipe !).

Pour voyager hors des sentiers battus

5 Films pour cheminer hors des sentiers battus. Découvrir des cinéastes émergent·es de grand talent et des films contemporains rafraichissants.

Un visage majeur du cinéma espagnol

Parce que le cinéma espagnol serait incomplet sans ses films de genre, nous vous proposerons 4 films, sélectionnés avec soin, qui décalent notre regard, le tordent et parfois s’en jouent.

Voir et revoir, dans les lieux partenaires du festival, des films documentaires qui ont marqué vos esprits (et les nôtres !).

un plongeon dans le cinéma du réel

Plongeon dans les eaux documentaires. Cinq Films documentaires qui proposent de nouveaux regards sur notre réel. Une compétition récompensée par un jury professionnel et le public (rendez-vous en salles pour donner votre avis !).

Avec Ciné por Mujeres

Proposé par Cine por Mujeres, un festival madrilène partenaire du festival, ce chapitre est composé de 6 films récents de réalisatrices espagnoles à suivre impérativement.

Les regards féminins, dont nous avons fait un chapitre et surtout le fil rouge de cette édition, se dévoileront ici avec des films récents, sélectionnés et mis au jour par Cine por Mujeres. Tous, signés par des femmes.

C’est dans ce chapitre que se révèlera bientôt notre film d’ouverture, un inédit immanquable.

 

« 40 ans du Festival de Brest »

Pour l’anniversaire du festival de courts de Brest, il nous fallait marquer le coup.
Un programme de courts-métrages espagnols, passés par le festival ces dernières années, viendra vous donner un avant-goût de la grande édition qui se prépare en Finistère… Des courts qui tapas !

En 3 films

3 films incontournables pour découvrir les différentes périodes d’une figure clef du cinéma espagnol.

Une histoire chaotique

Découvrez une sélection de films qui ont inspiré Almodóvar, le cinéaste cinéphile par excellence.

Resistiré para seguir viviendo*

Nous avons longuement cherché le titre de ce chapitre. La guerre en Espagne a imprégné le cinéma espagnol de mille façons différentes, pourtant, nous ne voulions pas dire guerre pour parler de ces films-bijoux…
Les 4 films de ce chapitre parlent de la guerre, c’est vrai, mais ils disent surtout la force et la pugnacité de celles et ceux qui ont résisté.
Un chapitre étonnant, composé de films documentaires et de films de fiction, pour dire au plus près la réalité de la guerre, les fracas et les silences qu’elle laisse derrière elle…

Montrer le temps qui passe, une certaine idée de la magie du cinéma

5 films du panorama espagnol, qui nous disent, chacun à leur façon, pourquoi et comment grandir.

Carte blanche au Festival Premiers Plans d’Angers

Un programme de 5 courts métrages proposé par le festival Premiers Plans d’Angers.

 » Voilà une grande cinéaste en devenir ! Auréolée de l’Ours d’or à Berlin en 2022, et en attendant son prochain film Romería, nous avons proposé au festival Premiers plans d’Angers de nous faire découvrir les courts-métrages qui l’ont menée à nous offrir deux pépites du cinéma contemporain (Été 93 et Nos Soleils). »
Une sélection en écho direct à celle  articulée autour des regards féminins.

« woman gaze »

C’est le grand chapitre de ce festival, le fil rouge et le fil conducteur. Ou plutôt conductrice ! Car il s’agit bien là de montrer un cinéma qui ne se laisse pas dicter de codes mais propose une seconde vision du monde.
C’est 5 films vous donnent à voir autre chose : des regards féminins.

Marco, l’énigme d’une vie

de Aitor Arregi, Jon Garaño

avec Eduard Fernandez, Nathalie Poza

Espagne | 2024 | 1h41

Enric Marco est le fondateur et le président de l’association des victimes espagnoles de l’Holocauste. À l’approche d’une commémoration, un historien conteste son passé d’ancien déporté. Marco se bat alors pour maintenir sa version alors que les preuves contre lui s’accumulent…

La Marseillaise des ivrognes

de Pablo Gil Rituerto

documentaire

France, Espagne, Italie | 2023 | 1h36

Rencontres

En 1961, sous le régime franquiste, une équipe de tournage composée d’ethnomusicologues italiens part sur les routes du nord de l’Espagne pour récolter des chansons populaires de la résistance. Les enregistrements clandestins sont alors minutieusement récoltés et répertoriés. Près de quarante ans plus tard, une nouvelle équipe de tournage revient sur les pas de ce groupe intrépide et offre un second souffle aux bandes sonores d’origine. Les témoignages d’hier croisent ceux de notre époque et les voix des artistes d’aujourd’hui qui réinterprètent en groupe ou en toute intimité ces chants de résistance. LP.

suivi d’une interprétation de chants républicains par 7 choristes

Le Silence des autres

de Almudena Carracedo et Robert Bahar

documentaire

Espagne | 2018 | 1h36

Rencontres

En 1977, deux ans après la mort de Franco et dans l’urgence de la transition démocratique, l’Espagne vote la « loi d’amnistie générale », aussi connue comme « le Pacte de l’oubli », qui libère les prisonniers politiques mais interdit également le jugement des crimes franquistes. Comment reconstruire une nation et des individu·es soumis·es depuis toujours à la loi du silence bien que victimes des crimes et exactions du régime franquiste ?
Tourné durant 6 ans, ce documentaire à la fois intense et pudique offre un éclairage sur le passé mais aussi le présent d’un pays fracturé. À travers les portraits et la persévérance de citoyen·nes rescapé·es du franquisme, nous découvrons la lutte bien actuelle d’un peuple voisin, contre l’oubli et l’indifférence, pour la vérité et la justice. Un film poignant, sobre et absolument nécessaire. LP.

Prix du Meilleur film documentaire, Goya 2019

suivi d’un échange et d’un témoignage d’un enfant kidnappé pendant la Retirada de 1939

Land And Freedom

de Ken Loach

avec Ian Hart, Rosana Pastor, Iciar Bollain

Royaume-uni, Italie, Espagne, Italie | 1995 | 1h45

1936 – David, jeune chômeur de Liverpool décide de rallier les forces républicaines en Espagne pour lutter contre le franquisme. Ken Loach, fidèle à lui-même, prend le parti des Républicains, en s’appuyant sur les rêves et les luttes d’une petite brigade cosmopolite et fraternelle. Ce bel élan révolutionnaire fait naître (ou perpétue) en nous l’espoir en l’humanité. Des personnages forts et attachants (Icíar Bollaín ici en tant qu’actrice avant ses superbes réalisations – en autres -). Avec Ken Loach nous savons que même si l’Homme est vaincu parfois, le fascisme n’est pas une fatalité : « ¡ no pasaran ! ». CA.

Sélection officielle, Cannes, 1995

Surcos (Les Déracinés)

de José Antonio Nieves Conde

avec Luis Peña, Maria Asquerino, Félix Dafauce

Espagne | 1951 | 1h44

La dictature franquiste des années 50 n’ignorait pas que le cinéma était un spectacle à même de nourrir l’imaginaire collectif. Contrôle et répression sont ainsi de mise lorsque Surcos (“les sillons”), aujourd’hui considéré comme l’un des meilleurs films espagnols de l’après-guerre, sort sur les écrans. Et quel parcours ! Vivement critiqué par l’Église et le pouvoir (et donc par le public) de par son aspect documentaire proche du néoréalisme, le film relate l’histoire d’une famille regagnant la ville à la recherche d’une vie meilleure, comme des milliers de familles espagnoles le firent à cette époque.
Surcos parvint presque miraculeusement à passer entre les ciseaux de la censure, et fut même sélectionné en compétition à Cannes de 1952. OC.

Sélection officielle, Cannes, 1952